« La pudeur fait partie de la foi (al-iman). » (hadith)
Comme nous l’avons déjà dit, dès que la foi est évoquée, un double degré de lecture est obligatoire.
Nous connaissons tous la pudeur du corps, et elle ne peut être attachée à quelque chose d’aussi profond que la foi.
Le pudique du corps peut en effet être totalement dénué de foi, l’être de manière totalement innée, non-volontaire, voire même subie.
Il est rapporté du Prophète – prière et paix sur lui – qu’il était des plus pudique… Et que fut l’argument de cette assertion ? Lorsqu’il n’aimait pas une chose, cela se voyait sur son visage. Son cœur et son visage étaient parfaitement connectés, comme un miroir, car le corps et l’Esprit ne faisaient qu’un.
Pour le cheminant :
Comme l’enseigne le hadith : « Si tu n’as pas de pudeur, fais ce que bon te semble. » Cela ne signifie évidemment pas qu’il s’agit uniquement de la pudeur corporelle, et que le sens de cette parole est « si tu n’as pas honte de montrer ton corps, alors fais ce qu’il te plaît ». Non, cela n’est pas le sens de cette parole, bien que certaines règles vestimentaires soient également à respecter.
Quelle est donc la pudeur du cheminant ? la pudeur du cheminant est un état du cœur qui se manifeste sur ses œuvres, sur ses choix.
« Si tu n’as pas de pudeur », si tu n’as rien dans ton cœur qui te pousse à la vigilance et à bien agir vis-à-vis de ton Seigneur, de ta personne et de l’ensemble de la création, alors « fais ce que bon te semble », car aucune règle ne te permettra de venir purifier ton cœur s’il n’est pas sensible au bien.
Quelle foi pourrait bien venir t’habiter si tu ne réagis pas face aux exigences qui sont nécessaires à ton avancée ? Quelle injonction divine, prophétique ou quelle sagesse pourrait venir influencer ta vie si en toi il n’y a pas cette gêne quant à ton incapacité et une volonté de l’habiller par ce qui te donnera de la force ?
Si le vêtement du corps habille le pudique et le préserve de la honte que lui procure la nudité, c’est la parure des Attributs divins, des Lumières célestes, qui vient habiller les défauts honteux du cheminant que nous appelons dans la voie « qualités humaines – siffat al-bashariya », et qui ne sont pas limitées aux seuls défauts connus, mais à tous les manquements dans la réalisation spirituelle.
Autrement dit, tout ce qui n’a pas encore atteint la perfection dans le cœur, dans l’âme du cheminant, est soumis à une pudeur honorable devant Celui qui regroupe l’ensemble des Qualités sublimes.
Par l’Amour issu de la contemplation, le serviteur, admirant la Perfection chez Celui vers qui il chemine, se verra vêtu de la Perfection seigneuriale.
Il verra que ce qui en lui était si faible, si limité, si humain, va désormais apparaître sous une forme sublime, parfaite, divine.
Il Le contemplera alors en se contemplant.
Pour aller à Lui, il n’y aura qu’un pas. Le pas de la pudeur intérieure. Le pas du refus de la médiocrité devant la Magnificence divine. Il préservera cette pudeur, car il sait qu’elle est ce qui lui permet d’être rapproché de lui, elle est ce qui donne une profondeur à sa foi.
Sans elle, ce n’est plus à un pas de son Seigneur qu’il se trouvera, mais voilé du plus grand des voiles, car comme l’a dit le Prophète – prière et paix sur lui : « La pudeur et la foi vont de pair. Lorsque l’une des deux disparaît, l’autre disparaît également. » Autrement dit, la Lumière qui permet de cheminer s’éteint dans le cœur de l’aspirant lorsque ce dernier préfère ce qu’il voit actuellement de lui à ce qu’il doit encore en découvrir. Elle s’éteint lorsque sa quête s’arrête, car il est alors tombé dans le trouble de l’autosatisfaction.
A un seul pas de Lui… tant que l’on chemine vers soi.