La science venant de Dieu (al-`ilm al-laduni)

Tout d’abord, où est mentionnée cette science ?

L’appellation de cette science provient du Coran, dans la sourate al-Kahf, lorsque le Prophète et Messager Moussa – paix sur lui – se mit à accompagner un serviteur particulier : al-khidr – paix sur lui.

Dieu dit : « Ils (Moussa et son valet) trouvèrent l’un de Nos serviteurs [al-khidr] à qui Nous avions donné une grâce, de Notre part, et à qui Nous avions enseigné une science émanant de Nous (`ilm laduni). » (Coran 18/65).

Al-khidr n’est pas n’importe qui. Il est un serviteur particulier dont le cas fit couler beaucoup d’encre chez les savants.

Son nom, al-khidr, signifie littéralement « le verdoyant ». La raison de cette appellation est due au fait qu’il est réalisé dans la science des Noms divins, dont la réunion est représentée par la couleur verte.

Al-khidr a plusieurs particularités, notamment sa longévité de vie, mais nous nous concentrerons sur celle que Dieu lui a prêtée dans ce verset coranique suscité : sa science émanant du « Nous » divin, représentant ici l’ensemble des Noms et Attributs.

Moussa est un Prophète et un Messager. Son rôle est intimement lié avec celui de son peuple. Dieu l’abreuve de Sa science, lui parle, le guide, et cela dans le but de transmettre à son peuple de cette guidée.

Le rôle de Moussa est donc ici celui d’intermédiaire pour le salut de son peuple, car il est celui que Dieu rendit capable de faire descendre les flux subtils et divins pour les transposer en règles et croyances (la Thora).

Moussa fut donc assigné à rendre palpable ce qui est ineffable et qui appartient au monde divin. C’est ainsi que peut être vu son rôle, et même sa raison d’être, et cela pour la sauvegarde des fils d’Israël.

En ce qui concerne son cheminement propre, celui qui va au-delà des croyances et Lois descendues pour son peuple, Moussa avait besoin d’être initié à ce qui lui permettrait de mieux connaître son Seigneur et de mieux se connaître lui-même.

Cette rencontre que Dieu lui permit d’avoir est la marque ultime d’Amour que Dieu lui témoigna, celle qui établit le lien serviteur-Seigneur sans prendre en considération le reste des mondes. C’est cette rencontre avec le serviteur possédant al-`ilm al-laduni qui fait vivre et comprendre le verset justement adressé à Moussa et à l’ensemble des cheminants marchant sur ses pas : « Et je t’ai assigné à Moi-Même. » (Coran 20/41).

Dieu rappelle ici à son serviteur sa condition première, sa servitude qui est la plus grande de ses richesses, avant les rôles qui lui seront donnés…

Nous avons en effet entendu le Shaykh sidi Mohamed Faouzi al-Karkari dire un jour dans le sens qu’il n’y avait pas un seul Prophète qui n’ait pas voulu mourir dans la station de la wilaya (amitié, sainteté) laquelle est le départ et le point d’arrivée de leur mission, la perfection de l’état de servitude en réunion avec celui de la seigneurie.

Quel rapport entre cette wilaya et al-`ilm al-laduni ?

Le `ilm laduni, celui qui reste caché en son début, son milieu et sa fin est précisément le Vin de la wilaya (sainteté) : il est ce qu’elle transmet à qui elle veut initier, à qui elle veut couronner du verset : « et je t’ai assigné à Moi-Même. »

Le `ilm laduni peut-il apparaître alors qu’il est caché ?

Ce qui est caché (batin) devient apparent petit à petit pour celui qui a appris à lire la science des âmes sur lesquelles l’Esprit écrit à l’encre de la prééternité. Il devient apparent pour celui qui lit, mais demeure caché pour tout second. Aucune créature, ni ange, ni jinn, ni homme ne peut venir étudier cette lecture avec celui qui étudie.

L’histoire même de Moussa demeure l’un des plus grands mystères coraniques, l’un des plus incompris, bien que tant commentés. Pourquoi ? Car il n’y a que les compagnons d’al-Khidr qui sauront lire ce que cette histoire recèle comme science. Ils liront les mêmes lettres, les mêmes mots, les mêmes versets que tout lecteur du Coran, mais leurs sens profonds s’écrieront sur leurs âmes, au point où ils seront devenus à leur tour Moussa, non pas dans son temps, dans sa chair ni dans son rôle pour les enfants d’Israël, mais dans sa réalité d’étudiant de la wilaya, dans sa condition de serviteur que Dieu a assigné pour Lui-même.

On peut parler, écrire, débattre, exposer, détailler ce dont traite le `ilm laduni par toutes sortes de support. Mais il restera caché pour l’ensemble des yeux, des oreilles et des sens de ceux qui voient et qui écoutent avec leurs corporalités, avec la limite de leur raison, avec leur réflexion et leur intelligence créées, ne pouvant s’élever au-delà de ce qui est apparu (dhahir) par la création divine. Comment ce qui est confiné à l’apparent (adh-dhahir) pourrait approcher une science qui demeure cachée (batina) quoiqu’il advienne ? Cela est impossible.

Si le `ilm laduni demeure caché, c’est parce qu’il est trop attaché à Dieu pour descendre – dans l’appréhension qui peut et doit en être faite – jusqu’au niveau de la créature.

Le `ilm laduni a besoin d’une monture céleste (al-bouraq) pour être atteint, une monture qui permet non pas de rejoindre le ciel et les galaxies, mais les cieux de l’âme humaine… Dans un voyage dont personne ne revient véritablement, dont personne ne peut ramener le But du voyage (al-`ilm al-laduni) auprès de ceux qui ne l’ont pas réalisé.

Celui qui a le mieux su faire descendre ce qui était élevé pour le plus grand nombre de gens, c’est le Prophète Muhammad – prière et salut d’Allah sur lui -, c’est pour cela qu’il est le sceau des Prophètes et que sa religion demeurera jusqu’à la fin des temps…

Et pourtant, les gens d’al-islam utilisent ce que leur Prophète a fait descendre depuis les cimes de la science jusqu’au monde apparent (les Textes) afin d’attaquer le `ilm laduni ainsi que son seul parfum. Le seul parfum du `ilm laduni venant revivifier la religion musulmane provoque de la part de ses adeptes une peur, une nostalgie pour leur mort intérieure, et une volonté de fermer ce flux divin venant les déstabiliser dans leur immobilité spirituelle.

Qu’est-ce que cela vient nous enseigner ?

Le caché absolu reste caché. Tout ce qui devait apparaître est apparu, et même lorsqu’une nouvelle explication devient accessible, elle reste cachée pour la totalité des gens, même des dits spécialistes de la science cachée…sauf pour ceux qui sont destinés à être initiés.

Le cheminant est ainsi celui qui fait de son domaine intérieur caché un monde apparent pour lui-même, rendant son être apparent changé pour ceux qui l’observent, sans qu’ils ne sachent ce qui est venu le chambouler.

Son apparent change par le vent de ses découvertes intérieures et cachées, par ce qu’il a lu des lettres de la prééternité. Quant à sa lecture, elle demeure un secret caché entre lui et Celui qui créa le Qalam et qui « enseigna à l’Homme ce qu’il ne savait pas » (Coran 96/5).

Louis M.
Louis M.
Spécialisé dans l'étude des Textes sacrés et autres Textes du corpus soufi. Disciple de la voie soufie Karkariya.

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